Consommation ou surconsommation

Venant du Burkina, pays l’envahissement des télécommunications n’atteint guère celui de mon pays actuel d’accueil en Europe, je m’interroge sur le progrès réel qu’apportent les nouveaux appareils de la téléphonie et leur présence permanente, surtout chez les jeunes. Où va s’arrêter cette consommation de la nouvelle technologie et quel sera son impact réel sur la vie personnelle et sociale?

A l’heure où nos brillants économistes, banquiers et divers intellectuels ne cessent leur refrain sur la nécessité d’une relance de la croissance, notamment par le développement de cette technique dite communicative que nous retrouvons constamment  dans nos rapports avec nous- même, notre entourage, mais aussi avec le monde, tous ces casques, jeux, musiques et jeux amplifient-ils réellement  les rapports humains, nos connaissances de l’autre et celle d’un environnement mondial devenu un village ou ne nous éloignent-ils pas de la réalité?

Plus les moyens de communications se multiplient et se perfectionnent, plus j’ai l’impression qu’ils diminuent la qualité des échanges en les réduisant très souvent à de la futilité ou à des stéréotypes dictés par de courts codes, tels que par exemple les émoticônes. Le dit se limite à un minimum de mots, de vocabulaire et l’image doit souvent exprimer un ressenti codifié et finalement impersonnel. C’est non seulement l’orthographe qui en prend un coup, mais bien plus encore l’originalité de l’expression, de la pensée et de la communication.  Non seulement ces nouvelles technologies réduisent tout cela, mais elles empêchent en même temps le temps nécessaire au vrai dialogue dans le quotidien des foyers.

Avant, tout jeune, je passais du temps avec mes parents. Cela m’a permis de tirer des enseignements, des valeurs et des armes pour le futur. J’ai pu connaître leur histoire, celle de mes grands-parents, de mon village. Beaucoup de jeunes n’ont plus le temps d’écouter les anciens, leur préférant le virtuel des jeux et autres partages souvent creux et narcissiques sur des réseaux dits  » sociaux ».

Sans nostalgie stérile envers le passé et en reconnaissant les énormes potentialités qu’offrent les nouvelles technologies de la communication et de l’information, l’adulte doit en tout cas lutter contre sa surconsommation pouvant devenir très vite un outil de destruction d’un humain devenu de plus en plus un objet de consommation et de profit via une élite qui bien souvent l’utilise comme tel, sans conscience morale. Du moment que cela rapporte… Il faut acheter et jeter. Croissance et croissance!

Il en va de même dans le domaine de l’information, ou plutôt  celui de la surinformation. Un seul clic suffit pour ouvrir une énorme bibliothèque, mais sans le guide pour y puiser l’essentiel de ce qui est recherché. Sans esprit critique pour séparer le blé de l’ivraie. Sans sens de la synthèse nécessaire à une appropriation d’un sujet.

A l’éducateur que nous sommes tous, d’une façon ou d’une autre, de tirer parfois la sonnette d’alarme  sur les dangers de cette nouvelle technologie. A chacun de nous d’oser encore le dialogue vrai, personnel, intergénérationnel dans la liturgie du vivre ensemble réel et non virtuel. C’est de l’emploi modéré et à bon escient de ce qui est vu comme progrès que dépendra celui qui ne se monnaie pas et fait de chacun un être humain et non un simple objet de consommation et d’information.

Les NTIC ont un apport et une contribution pour le développement et les luttes pour les droits communs. Nous y reviendrons dans nos prochaines publications.

Sana Ousmane