Cease Fire

« Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. »
(Article 2.1 de la Convention européenne des Droits de l’Homme)

“La violence par arme à feu est aujourd’hui une question de droits humains mondiale. Elle menace notre droit le plus fondamental : le droit à la vie”.
(Amnesty International)

CEASE FIRE

Cease Fire est un projet du Monde des Possibles asbl, financé par la Rosa-Luxemburg-Stiftung et la Hans-Böckler-Stiftung, qui étudie le lien entre les exportations d’armes à feu et les migrations vers la Wallonie :

– Dans quelle mesure les armes à feu influencent-elles les migrant.e.s à fuir leur pays d’origine ?
– Quelles sont les conséquences géopolitiques du commerce des armes à feu fabriquées en Europe ?
– Quelles sont les conséquences pour les populations en exil de leurs expériences face aux armes à feu ?

Téléchargez les actes du colloque final ici (PDF)

Dans le cadre du projet, un groupe de personnes migrantes ayant fui des atrocités dans leurs pays d’origine, travaille la question délicate des conséquences du commerce des armes sur les flux migratoires. A travers des capsules vidéo témoignant de leurs expériences personnelles avec les armes à feu, les participant.e.s souhaitent sensibiliser la population sur les enjeux et perspectives. Leurs voix et leurs vécus sont des réalités que nous ne voulons plus ignorer : être conscient.e.s des conséquences de nos actes en tant qu’européen.ne.s est le premier pas vers un futur plus juste et solidaire pour toute personne, peu importe son pays d’origine.

« J’ai appelé sa famille en annonçant le décès de leur fils. Depuis ce moment-là, je me suis dit que les occidentaux parlent des droits humains, mais ne les respectent pas. Je dis aux européens qu’ils ne défendent pas leurs droits, mais plutôt leurs propres intérêts. »
Anonyme, Guinée

 

Les objectifs de Cease Fire

– Offrir un canal d’expression aux victimes des armes à feu réfugiées en Belgique.
– Sensibiliser sur ce commerce sanglant par une activité de plaidoyer.
– Contribuer à améliorer les contrôles liés à l’octroi des licences d’exportations d’armes.
– Réfléchir à un futur sans armes qui puisse répondre aux besoins des populations en Europe, comme ailleurs dans le monde.
– Contribuer à un débat régional et européen sur la reconversion de l’outil industriel/la diversification de la production qui pourrait serait entendable pour les travailleur.euse.s et entreprises de fabrication d’armes à feu.
– Augmenter la participation civique et sociale de la communauté immigrée à Liège et renforcer la capacité de plaidoyer politique des personnes migrantes concernant leurs propres droits fondamentaux.
« Pour moi, ce projet a été créé pour sauver, pour aider les opprimé.e.s, pour demander le cesse-le-feu et pour dire non aux armes et munitions. Pour cela, j’ai le courage d’en parler. »
Anonyme, Mauritanie

Le groupe Cease Fire

Ibrahim Ahamat – République centrafricaine
Moussa Kalidou Diaw – Mauritanie
Amadou Ba – Mauritanie
Anonyme – Mauritanie
Mamadou Diallo – Guinée
Anonyme – Mauritanie
Anonyme – Mauritanie
Ibrahima Sow – Mauritanie
Anonyme – Guinée
Anonyme – Guinée
Anonyme – Guinée
Anonyme – Rwanda
Anonyme – Albanie

Méthodologie

L’éducation permanente est un des piliers du Monde des Possibles. Les séances du projet « Cease Fire » ont été animées sur cette base. La philosophie de l’éducation permanente permet de concentrer les ateliers sur les échanges de savoirs, l’analyse critique ainsi qu’une conscientisation sur les réalités vécues. Tout au long du projet, les participant.e.s ont été encouragé.e.s à s’exprimer sur tous les sujets traités, en parlant de leurs propres opinions, expériences et envies. Le respect, la bienveillance et le partage étaient les mots clés de toutes les activités.
Les séances « Cease Fire » ont été divisées en deux axes. Le premier axe penchait sur la découverte du commerce des armes en Belgique et dans le monde. Nous avons abordé les thèmes suivants :

• Le Traité sur le Commerce des Armes (TCA) et ses enjeux.
• La place de la Belgique dans le commerce mondial des armes.
• Le débat entre droit à la vie et droit au travail.
• La reconversion, comme une des possibles pistes d’action pour le futur.
• Les armes légères et leur prolifération facile.
• La militarisation des frontières et les relations entre Frontex et les industries de l’armement.
Nous avons approfondi ces thématiques en discutant de questions telles que :
– « Ce n’est pas parce qu’une chose est légale qu’elle est aussi morale » : qu’en pensez-vous ?
– Les armes ont-elles influencé votre décision de quitter votre pays d’origine ?
– Vous êtes Ministre : quelle mesure prenez-vous concernant les armes ?

Le deuxième axe visait à la mise en place d’une stratégie de plaidoyer. Nous avons discuté des différentes formes de plaidoyer, telles que la sensibilisation et la mobilisation. Nous avons parlé de nos attentes vis-à-vis ce projet et avons établi les objectifs de « Cease Fire » en construisant ensemble un plan de plaidoyer. Notre mission ? La création de témoignages sous forme de capsules-vidéo et une journée de sensibilisation dans une école liégeoise.

Commerce des armes ? Je veux en savoir plus !
Selon le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), en 2020, la Belgique occupait la 22ième place dans le classement des principaux exportateurs d’armes dans le monde. Comme l’explique le directeur du GRIP (Groupe de recherche et d’information sur la paix et la sécurité), Luc Mampaey, bien qu’en Flandre la production de l’armement existe aussi (surtout dans le domaine de l’électronique et des télécommunications), c’est la Wallonie qui a une véritable réputation dans la vente d’armes, surtout d’armes légères (RTBF, 2016).

« Le débat sur le commerce des armes est politique et motivé par les intérêts économiques, mais il est sous-réglementé. »
(Transnational Institute)
Ici, quelques données pour mieux comprendre le commerce des armes et ses enjeux :
• Environ 500.000 personnes meurent chaque année dans le monde à cause des armes à feu :
La majorité de ces personnes sont des civils. En effet, les trois quarts des décès par armes à feu occurrent hors conflit « tandis que 80% des victimes de conflits sont des civils » (Amnesty International, 2019).

• Small Arms Survey estime qu’il y a environ un milliard d’armes à feu en circulation dans le monde, en 2017 :
857 millions (85 %) sont entre les mains de civils, 133 millions (13 %) sont dans des arsenaux militaires et 23 millions (2 %) appartiennent à des organismes chargés de faire respecter la loi (Small Arms Survey).

• Les armes illégales dérivent, dans la majorité des cas, de stocks d’armes légales :
Dès sa sortie de l’usine, le statut d’une arme peut changer plusieurs fois du légal à l’illégal. Par exemple : les armes de propriété des soldats/policiers deviennent illégales quand ceux-ci les gardent en prenant leur retraite (Peters, Nations Unies).

• Selon Small Arms Survey, 38 % des armes légères militaires dans les arsenaux nationaux sont en surplus par rapport aux besoins :
Cela est une perte importante de ressources (l’achat des armes, leur enregistrement, leur entreposage, etc.), mais aussi un danger pour les populations qui vivent près de ces entrepôts : dangers d’explosion, mais également trafiquants, insurgés, criminels qui sont souvent attirés par ces lieux de stockage (Peters, Nations Unies).
Ce n’est pas clair, quel est donc le lien entre migrations et commerce des armes ?
• Selon un rapport du Transnational Institute, les armes fabriquées et vendues par l’Europe à des pays tiers provoquent des déplacements forcés et des migrations (Transnational Institute, 2021).

• Ceux qui provoquent la crise en profitent aussi !
Les industries d’armement bénéficient des politiques migratoires répressives de l’Union européenne en remportant des contrats pour la militarisation des frontières. La déstabilisation des pays où l’Europe exporte ses armes, contribue considérablement à l’enrichissement du secteur de l’armement grâce à la croissante sécurisation des frontières qui vise à stopper/diminuer les flux migratoires vers l’Europe (Transnational Institute, 2021).

« Si dans ton continent tu n’es pas en sécurité… Où est-ce que tu peux être en sécurité ? Il y en a, par exemple ici, en Occident. Malheureusement, les pays fabricateurs d’armes, ces là que tu peux te sentir en sécurité. »
Ibrahim Ahamat, République centrafricaine

Et la Belgique ?

• La Belgique fait partie des 10 plus grands exportateurs d’armes légères et de petit calibre dans le monde.
Voici le top 10 : Etats-Unis, Italie, Brésil, Allemagne, Corée du Sud, Autriche, Russie, Tchéquie, Turquie, Belgique (GRIP, 2019).
Les cinq destinations principales des armes wallonnes sont : l’Arabie saoudite, les Etats-Unis, la France, les Emirats Arabes Unis et le Pakistan (GRIP, 2019).

Pourtant, la Belgique a ratifié le Traité sur le Commerce des Armes (TCA) en 2014 :
Ce traité vise à renforcer les contrôles liés à l’octroi des licences d’exportation d’armes. Il exige des pays exportateurs de vérifier, préalablement au transfert, s’il y a des risques de :
1. violations des droits humains dans les pays importateurs, telles que génocides, crimes de guerre ou crimes contre l’humanité
2. violations du droit international humanitaire
3. affronts à la paix et à la sécurité.

En cas de non-respect de ces droits, le transfert doit être annulé (GRIP, 2014).

Et maintenant quelques question – réponse !
Pourquoi l’Arabie saoudite continue à recevoir des armes belges, quand il est connu que ces exportations enfreignent le TCA ?
En Belgique, et plus particulièrement en Wallonie, le débat est axé sur deux droits fondamentaux qui sont trop souvent représentés comme antagonistes : le droit à la vie et le droit au travail.

Arrêter complétement les exportations d’armes de la Belgique, est une discussion très délicate… Pourquoi ?
Le commerce des armes porte atteinte au droit à la vie, mais a également un poids économique en Belgique : 71 entreprises belges sont impliquées dans le secteur de l’armement. Ces sociétés emploient 11.403 travailleurs (GRIP, 2019).

Sources
https://armstrade.sipri.org/armstrade/html/export_toplist.php
https://www.rtbf.be/info/economie/detail_que-pese-l-industrie-de-l-armement-en-belgique-et-en-wallonie?id=9179377
Amnesty International, 2019 : https://amnestyfr.cdn.prismic.io/amnestyfr%2F0112136f-ea57-4360-9937-6f75a847c2f9_livret-activites-pe%C2%81dagogiques_commerce-des-armes_droits-humains.pdf

VIOLENCE PAR ARME À FEU – INFORMATIONS CLEFS

Moreau, GRIP : https://grip.org/wp-content/uploads/2014/06/EC_2014-06-04_FR_V-MOREAU.pdf
Peters, Nations Unies : https://www.un.org/fr/chronicle/article/armes-legeres-il-ny-pas-de-solution-unique
GRIP, livre
Transnational Institute, 2021 : https://www.tni.org/files/publication-downloads/smokingguns-report-tni_final.pdf
Small Arms Survey : https://www.smallarmssurvey.org/database/global-firearms-holdings